vendredi 28 juin 2013

L'Arkan : les cinq piliers

L’ensemble de ceux qui adhérent au Coran forme "l’Umma1" ; c’est-à-dire la "Communauté" des croyants :

« Vous formez la meilleure Communauté
suscitée pour les hommes ;
Vous ordonnez ce qui est convenable
Vous interdisez ce qui est blâmable
Vous croyez en Dieu »
Sr 3, 110

« Notre Seigneur !
fais de nous des croyants qui te seront soumis ;
fais de notre descendance une communauté qui te sera soumise ;
indique-nous les rites que nous devrons observer »
Sr 2, 128

Tous ceux qui s’écartent de "l’Umma" s’écartent de la Foi. Pour les musulmans toute parole et tout acte de la vie ont une portée religieuse et tout acte religieux est signe de l’appartenance à l’Umma.
Dans le Coran, Dieu a parlé aux hommes par son prophète ; il a donné "ses Ordres2" au sujet du culte et des lois qui doivent régler les actes humains.
Le Coran est donc le fondement des pratiques religieuses et des obligations auxquelles tout musulman est astreint.
Ces obligations appelées les "piliers de l’Islam" sont au nombre de cinq :

1) La Chahada : la profession de Foi

Cette profession de Foi consiste à dire, uniquement : "il n’y a pas d’autre Dieu qu’Allah et Mohammed est son prophète". Le verset coranique ci-dessous est un véritable condensé de la doctrine islamique sur l’Unicité de Dieu :

« Dis,
Lui, Dieu est Un !
Dieu,
L’impénétrable !
Il n’a point enfanté !
Nul n’est égal à Lui3 ! »
Sr 112, 1-4

« Mohammed est le prophète de Dieu ».
Sr 33, 40

Un verset du Coran va jusqu’à dire que Dieu témoigne lui-même sur lui-même :

« Dieu atteste, ainsi que les anges et les possesseurs de la science
qu’il n’est de divinité que lui …
nulle divinité que lui, le puissant, le sage »
Sr 3, 18

Il suffit de faire cette profession de Foi devant témoins pour être considéré comme musulman, et pour appartenir à l’Umma.
Le musulman se doit de formuler cette profession de Foi tous les soirs avant de se coucher ainsi qu’à l’heure où il se sait parvenu au terme de sa vie ou face à un grand danger.

2) La "Salat" : la prière rituelle

Tout vrai musulman, pour signifier la place primordiale que Dieu occupe dans sa vie, est appelé à prier cinq fois par jour4 ; ces cinq moments sont indiqués par la position du soleil :

à l’aube
à midi
l’après-midi
au coucher du soleil
à la tombée de la nuit
(Sr 76, 25 – 26)

A l’appel du Muezzin5, le croyant, pour prier, doit se tourner vers le Mecque.

« Tourne donc ta face
dans la direction de la Mosquée sacrée.
Où que vous soyez,
Tournez votre face dans sa direction. »
Sr 2, 144

Pour la prière, s’il ne peut se rendre à la « mosquée6 », le musulman est appelé - dans la mesure du possible - à faire ses ablutions7 pour signifier qu’il se débarrasse de toutes les impuretés qui souillent son cœur :

« Ô vous qui croyez !
Lorsque vous vous disposez à la prière :
Lavez vos visages et vos mains jusqu’aux coudes ;
Passez les mains sur vos têtes
Et sur vos pieds jusqu’aux chevilles. »
Sr 5, 6

Lorsqu’il se met en prière, il adopte plusieurs positions :
debout, les mains jointes
inclinée, les mains sur les genoux
prosternée, le front sur le sol
assise, les fesses sur les talons.

A propos de ces inclinaisons et de ces prosternations, il est probable que Mohammed ait repris les coutumes des moines chrétiens qu’il a rencontrés.
Aujourd’hui encore, dans les couvents d’Ethiopie, les moines pratiquent ce genre de mouvements du corps.

Quand le Coran désigne les musulmans, il les appelle souvent « ceux qui s’inclinent et ceux qui se prosternent » Sr 9, 112

Il est souhaité que cette prière se fasse collectivement et mieux encore à la Mosquée, surtout le vendredi8 et les jours de fêtes :

« O vous les croyants !
Quand on vous appelle à la prière du vendredi
Accourez à l’invocation de Dieu !
Interrompez tout négoce :
C’est un bien pour vous,
Si vous saviez  »
Sr 62, 9

La Mosquée
La Mosquée est un édifice consacré à la prière et à la prédication. Elle est constituée d’une salle très large, avec sur le sol des tapis car chacun doit être déchaussé. Une sorte de niche pratiquée dans la muraille (le mihrab) indique la direction de la Mecque.
"L’imam", c’est-à-dire celui qui est préposé à la prière et à la prédication, s’exprime du haut d’une chaire : "le minbar".
L’édifice est surmonté d’une tour : le Minaret, du haut duquel le Muezzin lance son appel à la prière. Il est également précédé d’une cour avec, à l’intérieur, un bassin ou une fontaine qui permet les purifications rituelles avant l’entrée dans la Mosquée

Le fidèle commence sa prière par ces mots : « Allahu akbar’ », c’est-à-dire « Dieu est grand ». Ensuite, debout, il récite cette prière :

« Au nom de Dieu :
celui qui fait miséricorde,
le Miséricordieux.

Louange à Dieu,
Seigneur des mondes :
Celui qui fait miséricorde,
Le miséricordieux,
Le Roi du jour du jugement.

C’est toi que nous adorons,
C’est toi
dont nous implorons le secours.

Dirige-nous dans le chemin droit :
Le chemin de ceux que tu as comblés de bienfaits ;
Non pas le chemin de ceux qui encourent ta colère
Ni celui des égarés. »
Sr 1, 1-79

à laquelle il ajoute quelques versets du Coran librement choisis comme par exemple ceux-ci :

« Notre Seigneur !
Nous avons entendu un crieur,
criant pour nous appeler à la foi ;
« Croyez en votre Seigneur  »
et nous avons cru.

Notre Seigneur !
Pardonne-nous nos péchés !
Efface nos mauvaises actions !
Rappelle-nous à toi avec ceux qui sont bons.

Notre Seigneur !
Accorde-nous
ce que tu nous as promis par la voix de tes prophètes ;
Ne nous afflige pas le jour de la Résurrection.
Tu ne manques jamais à ta promesse. »
Sr 3, 193 - 194

La prière achevée, il tourne sa tête à droite puis à gauche pour adresser la Paix de Dieu au monde entier.

Outre la prière rituelle qui est obligatoire, le Coran recommande au croyant10 la prière spontanée (dua), le plus souvent possible dans la journée pour louer Dieu mais aussi lui exprimer sa foi, ses besoins, ses peines, ses joies, ses peurs et lui demander pardon :

« L’homme ne se lasse pas d’appeler le bonheur
et si le malheur le touche
il est plein d’une prière sans fin »
Sr, 41, 49 et 61

3) Le Ramadan11 : un mois de jeûne

Pendant le Ramadan, qui dure un mois complet, tout musulman parvenu à maturité et normalement constitué doit pratiquer un jeûne très strict, du lever au coucher du soleil ; c’est-à-dire, s’abstenir de toute nourriture et de toute boisson ainsi que du tabac et de relations sexuelles.
Certains cas de dispense sont prévus (par exemple : pour les voyageurs, les malades, les combattants, les blessés, etc.) ; cependant, celui qui en a bénéficié devra s’acquitter de son devoir de jeûne dès que sa vie sera revenue à la normale :

« O vous qui croyez !
Le jeûne vous est prescrit …
Jeûnez durant les jours comptés …

Ceux qui pourraient jeûner et qui s’en dispensent,
devront, en compensation, nourrir un pauvre.
Celui qui, volontairement, fera davantage
y trouvera son propre bien.

Jeûner est un bien pour vous.
Peut-être le comprendrez-vous.
Le Coran a été révélé durant le mois de Ramadan.
C’est une Direction pour les hommes ;
une manifestation claire de la Direction et de la Loi.

Quiconque d’entre vous, verra la nouvelle lune
jeûnera le mois entier.
Celui qui est malade ou celui qui voyage
jeûnera ensuite le même nombre de jours.
Dieu veut la facilité pour vous,
il ne veut pas, pour vous, la contrainte.

Achevez cette période de jeûne ;
exaltez la grandeur de Dieu qui vous a dirigés.
Peut-être serez-vous reconnaissants …

La cohabitation avec vos femmes vous est permise
durant la nuit qui suit le jeûne.
Elles sont un vêtement pour vous,
vous êtes, pour elles, un vêtement …

Mangez et buvez
jusqu’à ce que l’on puisse distinguer à l’aube
un fil blanc d’un fil noir.
Jeûnez, ensuite jusqu’à la nuit …

Telles sont les Lois de Dieu
ne les transgressez pas. »
Sr 2, 183 – 187

Par cette démarche d’ascèse, le Coran appelle les fidèles à témoigner qu’ils se soumettent à Dieu, source de tous biens.
C’est aussi pour eux le moyen de faire l’expérience de la pauvreté et ainsi, de mieux comprendre ceux et celles qui vivent dans la précarité ou qui sont amenés à mendier pour obtenir une aide12.
Le mois de jeûne est aussi un temps où le musulman apprend à se maîtriser, c’est-à-dire à résister à ses passions et à ses tentations ; un temps également qui lui est offert pour renouveler et approfondir sa foi13.
Le Ramadan est, en outre, une période de l’année qui permet de resserrer les liens familiaux et sociaux14 : le soir, le jeûne terminé, les musulmans ont, en effet, l’habitude de réunir proches, amis, voisins et de se restaurer dans un esprit de partage et dans une atmosphère conviviale et chaleureuse.
La fin du jeûne est marquée par une fête : l’Aïd es Seghir15 ou « fête des gâteaux » que les musulmans s’offrent mutuellement au sein de leur quartier ou de leur cité. Pour les musulmans, se retrouver ensemble pour exprimer leur Foi est essentiel, ne serait-ce que pour signifier leur appartenance à l’Umma.

4) La Zakat16 : l’Aumône légale

Parmi les obligations religieuses, le Coran place l’aumône sur le même rang que la prière ; quand il parle de la première, très souvent il cite, conjointement, la seconde. Elle a pour but de purifier ce que l’on possède, de la souillure du péché :

« Prophète, prélève sur leurs biens
une aumône par laquelle tu les purifieras »
Sr 9, 104

L’aumône légale dont le montant est fixé en fonction des richesses, est un impôt que tout musulman est tenu à verser chaque année à la Communauté17.
Le Coran nous dit à qui elle est destinée :

« Les aumônes sont destinées :
aux pauvres et aux nécessiteux ;
à ceux qui sont chargés de les recueillir
et de les répartir ;
à ceux dont les cœurs sont à rallier (à l’Islam)
au rachat des captifs ;
à ceux qui sont chargés de dettes ;
à la lutte dans le chemin de Dieu et au voyageur.
Tel est l’ordre de Dieu.
Dieu sait et il est juste. »
Sr 9,60

Par ce geste, le croyant montre qu’il est prêt à se détacher des biens que Dieu lui a accordés et qu’il se veut solidaire de tous les membres de la Communauté : pas seulement de celle à laquelle il appartient mais de toutes les Communautés musulmanes de par le monde : l’Umma.
Comme pour la prière, le Coran distingue l’aumône légale de l’aumône spontanée (la çadaqa), que le vrai musulman est invité à faire, pour l’amour de Dieu, chaque fois qu’il se trouve en présence de personnes dans le besoin ou la détresse :

« L’homme bon …
est celui qui pour l’amour de Dieu, donne de son bien à ses proches, aux orphelins, aux pauvres,
aux voyageurs, aux mendiants
et pour le rachat des captifs. »
Sr 2, 177

Quel que soit le montant de l’aumône, le Coran répète à plusieurs reprises que celle-ci n’a de valeur aux yeux de Dieu que si les personnes la font avec cœur, avec désintéressement et dans un esprit de réconciliation :

« Vous n’atteindrez pas à la piété vraie,
tant que vous ne donnerez pas en aumône
ce que vous aimez.
Quoi que vous donniez en aumône,
Dieu le sait. »
Sr 3, 92

« Ô vous qui croyez !
faites l’aumône des meilleurs choses
que vous avez acquises
et des fruits que, pour vous,
nous avons fait sortir de la terre.
Ne choisissez pas ce qui est vil
Pour le donner en aumône. »
Sr 2, 267

« Une parole convenable et un pardon
sont meilleurs qu’une aumône suivie d’un tort.
Dieu se suffit à lui-même
Et il est plein de mansuétude. »
Sr 2, 263

5) Le Hajj : le Pèlerinage à la Mekke

Le Coran exhorte également tous les fidèles à effectuer, au moins une fois dans leur vie, un pèlerinage à la Mecque, « la Mère des cités18 ».
Ce pèlerinage obligatoire – sauf impossibilité absolue – a lieu le 12ème mois de l’année :

« Il incombe aux hommes
- à celui qui en possède les moyens -
d’aller pour Dieu, en pèlerinage à la Maison … »
Sr 3, 97

« Si vous en êtes empêchés
envoyez en compensation …
l’offrande qui vous est facile …
Le Pèlerinage a lieu en des mois déterminés.
Le pèlerin devra s’abstenir
de toute cohabitation avec une femme,
de libertinages et de disputes,
durant le pèlerinage.
Sr 2, 196-197

Conçu essentiellement comme une démarche de soumission à Dieu et de repentir, il permet à tous les pèlerins de renouveler leur Foi mais aussi de recevoir le pardon de Dieu, moyennent plusieurs obligations rituelles :
le port d’un vêtement blanc spécialement conçu pour le pèlerinage ainsi que des sandales,
l’interdiction de se raser et de se laver,
l’absence de relations sexuelles,
de fréquences ablutions pour se purifier.

Durant les quatre jours que dure le pèlerinage, les fidèles récitent des prières pour exprimer leur Foi et leur soumission à Dieu puis se rendent à la Kaaba dont ils font sept fois le tour, en envoyant un baiser à la Pierre noire en signe de leur amour pour Dieu et de leur reconnaissance.
Après avoir couru dans le désert - en souvenir de la fuite et de la souffrance d’Hagar19 et de son fils Ismaël renvoyés par Sarah - les pèlerins lancent des pierres sur de petites stèles qui symbolisent les esprits mauvais, voulant manifester ainsi qu’ils rejettent le démon20.

C’est pendant la période du pèlerinage, le 10 du mois, qu’a lieu « l’Aïd el Kebir » : la fête durant laquelle les musulmans tuent le mouton pour commémorer le sacrifice d’Abraham, modèle de la totale soumission à Dieu.

Lorsque les croyants venus du monde entier se rendent à la Mecque par centaine de milliers, ils préfigurent par leur démarche le « retour » final de tous les hommes vers le seul Dieu et le rassemblement futur de l’humanité, le jour du Jugement dernier.
Pour les musulmans, le pèlerinage à la Mecque est en même temps l’occasion de prendre conscience, qu’au-delà de leurs différences ethniques, culturelles et doctrinales, ils appartiennent tous à l’Umma.
Considérée comme un territoire sacré, la Mecque est strictement interdite aux « infidèles », c’est-à-dire à tous ceux et celles qui ne sont pas musulmans. (Sr 9,1-12)

____
1 La circoncision pratiquée sur les musulmans est le signe de l’appartenance à l’Umma.
2 C’est-à-dire ses "Commandements".
3 Pour signifier que Dieu est Un, le croyant est invité à pointer son index vers le ciel, c’est-à-dire vers Allah.
4 La prière doit être dite en arabe, la langue sacrée utilisée par l’ange de Dieu.
5 "Muezzin", c’est-à-dire, celui qui invite les fidèles musulmans à la prière.
6 C’est-à-dire "lieu où l’on se prosterne".
7 S’il en à la possibilité, il doit s’isoler pour montrer qu’il se consacre corps et esprit à Dieu et symboliser un espace de prière en étendant un tapis.
8 Le vendredi est ce que le samedi est pour les juifs et le dimanche pour les chrétiens. La prière célébrée le vendredi (à midi) est obligatoire pour les hommes et non pour les femmes.
9 Cette sourate est appelée : la fatiha" c’est-à-dire "l’ouverture".
10 Ce mot "croyant" ("muslim" en arabe) désigne les musulmans sincères et fidèles qui ne se soumettent pas seulement de façon extérieure.
11 Ce mot désigne le 9ème mois de l’année (lunaire) musulmane.
12 Le Ramadan rappelle aux riches l’existence des pauvres.
13 Souvent, les mosquées sont ouvertes une partie de la nuit pour permettre aux croyants de se replonger dans le Coran et de prier plus intensément.
14 L’observance du Ramadan n’est pas seulement une démarche personnelle mais une manifestation sociale.
15 A distinguer de l’Aïd el Kebir, la fête qui commémore le sacrifice d’Abraham. Voir "Fêtes musulmanes" dans le lexique.
16 Mot dont la racine signifie « purifier ». L’aumône est considérée comme un moyen de purification.
17 Cette aumône est comparable à ce qu’on appelait autrefois la "dîme". Le prélèvement de la Zakat s’effectue sur le cheptel, les récoltes, les marchandises et sur l’or et l’argent.
18 C’est ainsi que le Coran appelle la Mecque.
19 Hagar : la servante que Sarah avait introduite dans la couche d’Abraham pour qu’elle lui donne un enfant qu’elle-même ne pouvait lui donner.
20 Par ce geste, ils veulent rappeler la destruction par Mohammed de toutes les idoles qui entouraient la Kaaba.

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